Good Boy, d’Antoine Charbonneau-Demers, Prix du roman gay 2020, est un roman d’apprentissage de la sexualité, de l’amitié, de l’amour et de la vie en général des adultes, à travers les yeux d’un jeune gay de 19 ans, fraîchement débarqué dans une grande ville québécoise. Un véritable génie fou.
L’histoire
Il a dix-neuf quand il débarque dans une grande ville québécoise. Il a quitté sa famille pour s’installer avec son amie Rosabel dans une grande maison partagée avec son couple de propriétaires : Patrick et Florentia, vieille femme presque folle atteinte d’Alzheimer.
Pendant quelques jours, avant que sa première année de fac ne commence, il reste enfermé chez lui à ne rien faire. Il se rend compte de l’inanité de sa vie quand la troisième amie de sa bande arrive un jour chez eux et leur partage son besoin de « péter le cube », faire exploser le cadre dans lequel elle s’est enfermée. Elle veut vivre à mille pour cents. Et lui aussi. Il veut découvrir la ville et les hommes.
C’est le début pour lui d’un enchaînement d’épisodes incontrôlés qui vont le conduire du cauchemar jusqu’au rêve. Il va devoir affronter ses angoisses, la folie des adultes et les siennes, pour trouver du sens dans des événements qui n’en ont pas. Il va découvrir la profondeur de l’amitié, du désir, de l’amour et de ce que c’est au fond qu’être adulte.
Qui est Antoine Charbonneau-Demers ?
Né en 1994 dans la province d’Abitibi-Témiscamingue au Québec, Antoine Charbonneau-Demers est un jeune auteur gay canadien à la bibliographie déjà bien fournie.
Son premier roman Coco, sorti en 2016, a reçu le Prix Robert-Cliche du premier roman.
Le suivant, Good Boy, sorti deux ans plus tard chez le même éditeur québécois, VLB Éditeur, connaîtra une vie plus complète, avec une lecture performée à Montréal, puis une adaptation en pièce. Il sera réédité en France par les éditions Arthaud, sans « traduction » en français, mais avec des notes de bas de page pour clarifier des expressions québécoises. À l’automne 2020, il remporte le Prix du roman gay.
En mars 2019, sa nouvelle La femme à refaire le monde remporte le 34e Prix du Jeune Écrivain du Salon du livre de Paris.
Lors du confinement de mars 2020, il écrit son troisième roman Daddy.
Comment a-t-il fini sur ma table de chevet ?
Ce livre s’est vraiment imposé à moi. Je l’ai d’abord découvert dans un numéro de Têtu. Un instagrammeur m’a conseillé de nombreux titres et insisté sur celui-ci, me disant que même s’il ne lui avait pas plu, je devrais aimer.
J’ai commencé à lire un extrait sur ma liseuse avant qu’il ne reparaisse aux Éditions Arthaud, donc sans note de bas de page. Malheureusement, le québécois m’a rebuté. Je ne suis donc pas allé plus loin. Quand il a reçu le prix du roman gay et qu’une autre connaissance d’Instagram me l’a encensé (en même temps que Coco), je me suis résigné : il fallait que je lui redonne sa chance.
Mon avis
J’ai bien fait de « péter le cube » de ce roman. Ma première réticence vis-à-vis du québécois a laissé place à une attirance, comme pour les films de Xavier Dolan (je sais, la comparaison est extrêmement facile !). Je l’ai dévoré en quelques heures.
Ce livre décrit parfaitement bien ces quelques mois de transition entre la vie au sein de la famille et le passage à l’indépendance. Il nous plonge avec un parfait réalisme dans la découverte de la sexualité homosexuelle, avec toute sa crudité, sa cruauté, ses codes qu’il faut décrypter et cette angoisse de la jeunesse. Il y a cette oppression sur le physique qui est un frein au lycée, mais un atout dans le milieu gay. Il y a cette pression du paraître. Il y a cette obsession d’être par-delà soi-même.
Au-delà du roman d’apprentissage, c’est une forme de folie à la Gregg Araki qui transpire dans ce livre qui le rend unique. C’est une démence flagrante, des psychoses dévorantes, voire des hallucinations ardentes. Le jeune ne distingue pas encore ce qui relève de la psychose et de la réalité d’un monde qu’il n’appréhende pas. C’est notre regard d’adulte qui y cherche du sens. Et on se rend vite compte que cette quête de sens est absurde, pour réaliser enfin que la vie demeure complexe.
Le style est puissant. Il révèle à lui-même toute l’absurdité de notre monde et la manipulation du langage. Good boy, Daddy… tous ces mots que l’on s’attribue pour se rassurer ou s’exciter dans une position bien commode.
Devez-vous lire ce livre ?
Oui. Déjà parce qu’il a reçu le prix du roman gay 2020. Ensuite, parce qu’il offre un regard intéressant sur la découverte de la sexualité homosexuelle à l’heure des applications de rencontre. Il est vivifiant, inquiétant, essentiel.
Citation
Nous avons fait l’amour, et je ne sais pas ce que ça veut dire, mais j’ai été pris de panique quand il n’a pas mis de condom. Il est entré comme ça, pas pour me violer ou parce qu’il s’en fout, mais pour une raison plus sérieuse que ça, et je ne veux pas dire ce que c’est. Je ne veux pas dire que c’est parce qu’il m’aime. Qu’il veut me garder juste pour lui. Et je ne veux surtout pas dire que c’est parce que je l’aime que je n’ai rien dit. Je n’ai rien dit. Parce que nu, avec du froid dans les os, sous la douche, le cul déjà tout offert, je n’avais rien à dire.
Good Boy, Antoine Charbonneau-Demers.

Où le trouver ?
En bibliothèque ou librairie, neuf ou d’occasion, numérique ou papier, avec les informations suivantes : Good Boy, Antoine Charbonneau-Demers, Arthaud, 2020 (première édition chez VLB Éditeur, 2018).
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